![]() Cette
photo a souvent
été présentée comme celle
de Klaus Barbie
au milieu de ses camarades,
par exemple par Serge Klarsfeld. Il
y a cependant un doute sur l'identité du personnage
ici
photographié Le personnage lui
ressemble, certes.
Mais on ne sait ni où, ni quand, ni avec qui ce
cliché a
été pris... Un expert assure que le personnage
n°6
est adjudant-chef de la Feldgendarmerie (Wehrmacht). Il porte sur la
gauche de sa vareuse (modèle 1935) l'insigne de brevet
sportif.
L'expert pense, d'après les uniformes, que la photo a
été prise à la fin de 1942. Il n'y
trouve aucun
signe SD ou SS.
|
Klaus Barbie était un officier S.S. |
Jean Moulin était l'envoyé en France du général de Gaulle, chargé d'unir les mouvements de résistance. C'était donc le chef le plus important de la Résistance en France. Le 21 juin 1943, Klaus Barbie, probablement renseigné par un traître, réussit à arrêter tous les résistants présents à une réunion, dans la maison du Docteur Dugoujon, à Caluire, dans la banlieue de Lyon. |
Jean
Moulin en 1941.
![]() |
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Le Jeudi 6 avril 1944, Klaus Barbie arrête les 44 enfants juifs réfugiés dans une maison d'Izieu, dans l'Ain, à 80 km de Lyon. |
![]() Le
Monde, 18 août
1983
D'abord protégé par les services secrets américains qui l'utilisent au début des années 50, Klaus Barbie se réfugie ensuite en Amérique Latine. En Bolivie, il met ses compétences au services de la dictature. Il dispose d'un passeport diplomatique et va en Europe négocier des achats de véhicules militaires destinés à la répression des manifestations d'opposition. |
![]() Le général-dictateur Banzer en 1974. |
![]() Serge et Beate Klarsfeld . Lui est le fils d'un déporté assassiné à Auschwitz, elle est allemande, ensemble, ils traquent les nazis et réussissent à identifier Klaus Barbie en 1971. |
![]() Klaus Barbie à Lima en 1972 |
![]() La Une du journal Le Monde annonce l'expulsion de Klaus Barbie (6-7 février 1983). Le dessin de Plantu représente Klaus Barbie descendant de l'avion : des déportés en costume rayé et un grand Jean Moulin l'attendent au pied de la passerelle. ![]() La Une du journal Libération du 7 février 1983 |
Le pouvoir politique change en Bolivie et Klaus Barbie est arrêté. La nationalité bolivienne lui est retirée au motif qu'il a fait de fausses déclarations pour l'obtenir. Il est expulsé de Bolivie et se retrouve dans un avion vers la France. ![]() Photo
parue dans Le
Matin du
7 février 1983
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![]() Le Monde du 12 mai 1987 annonce l'ouverture, la veille, du procès de Klaus Barbie. |
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Lyon (envoyé spécial) D'un geste de la main. Lise Lesèvre refuse la chaise qu'un huissier lui apporte et remercie le président Cerdini pour cette attention. En déséquilibre, elle pose sa canne contre le mur, s'aggrippe à la barre des témoins et redresse la tête, les pieds serrés l'un contre l'autre. Une grande dame de 86 ans. Bouleversante de fragilité et de force, de tranquillité sereine. Seules ses lèvres tremblent, semblant parfois sangloter les mots. Ce qu'elle a à nous dire ne pourrait l'être autrement. Lise a 43 ans. Ce 13 mars 1944, instinctivement, elle sait que les choses tournent mal. Son contact est en retard. Elle ne peut rester plus longtemps au milieu de cette gare, chargée qu'elle est de plis et de documents à remettre à un messager de l'Armée secrète (AS). Au bout du quai, la Gestapo. « Ils étaient trois, murmure-t-elle, trois sauvages. » Arrêtée pour un contrôle, elle est emmenée à l'Ecole de santé militaire de Lyon, siège de la police allemande puis jetée dans une cave pour la nuit. «C'est le lendemain que j'ai fait connaissance avec Barbie et ses yeux terriblement mobiles d'animal en cage. » Lise Lesèvre a essayé d'avaler des documents, elle en a fourré d'autres dans ses gants juste après l'arrestation. Mais elle n'a pu dissimuler le pli destiné à « Didier », un jeune agent de liaison sans importance au sein de l'organisation, que la Gestapo va confondre avec «Didier», l'autre, le chef de l'Armée secrète pour la région sud. « Quand Barbie est entré dans la pièce, il était fou de rage, raconte Lise Lesèvre. Il m'a emmenée dans une salle où j'ai tout de suite remarqué les choses étranges posées sur la table. » Nous allons parler de torture. La vieille dame s'excuse auprès du tribunal des détails qu'elle va devoir lui fournir. Elle le fera sans larme. «D'abord, Barbie m'a mis des menottes à griffes. Des griffes qui sont à l'intérieur. A chaque silence de ma part, il serrait les menottes un peu plus. J'ai cru que mes ongles se détachaient sous la douleur.» Les questions sont les mêmes, toujours les mêmes, jour et nuit. «Où est Didier?», «qui est Didier?» Lise Lesèvre ne parle pas. Peu. importe, la Gestapo a le temps. « Alors, ils m'ont pendue par les poignets et m'ont frappée. Combien de temps? Je ne saurais le dire. Je me réveillais toujours couchée sur le ventre, à terre. Et puis il me pendait à nouveau jusqu'à ce que je perde connaissance. » Lise Lesèvre parle de Barbie. Elle a eu le temps de le voir, de l'apprendre même, de le garder enfoui. « II portait toujours une cravache ou un nerf de bœuf. Il frappait systématiquement ceux qui étaient à sa portée. Lorsqu'il n'y avait personne, il tapait sur ses bottes. C'était comme ça qu'on le reconnaissait avant l'interrogatoire. Ce bruit terrible du fouet tapé en cadence sur des bottes. Quand il entrait dans la pièce, il n'avait rien d'humain. Vraiment, une sorte de chose sauvage. Il prenait un plaisir sadique à faire mal. » Lise ne parle toujours pas. Alors Barbie se penche au-dessus d'elle et lui dit : « Noux allons aller chercher ton mari et ton fils. Devant eux, tu parleras.» La femme est effondrée. « Toute seule, raconte-t-elle avec une voix fluette, je pouvais tenir mais avec eux, je savais que cela allait être plus difficile. » Un matin, son fils de 16 ans et son mari entrent dans la pièce. Lise est là. Ils se frôlent et se souhaitent courage. Gestes pressés, tiédeur de l'autre, instant de silence éternel. «On les a embarqués et moi, on est venu me réveiller en pleine nuit. Barbie m'a emmenée dans une salle avec une baignoire au milieu. Il a enlevé sa montre, l'a accrochée. Il était minuit. Cela a été une terrible épreuve. » Lise refuse de se déshabiller. Des policiers lui arrachent ses vêtements de force et la plonge toute entière dans l'eau.
Quand on la conduit dans la salle de torture, elle croise d'autres malheureux, couchés à terre, ensanglantés. « Barbie prenait un plaisir bouleversant. Au retour des interrogatoires, personne ne pouvait tenir sur une chaise. On nous faisait allonger à terre. Barbie retournait les visages avec la pointe de sa botte et écrasait la tête du torturé lorsqu'il croyait reconnaître un juif. » Une nouvelle fois, Lise Lesèvre est emmenée. «Ils m'ont fait la table d'étirement. C'était une table en acier. Mes chevilles étaient attachées d'un côté, les poignets de l'autre et ils agrandissaient la table tout en me tapant dessus avec un nerf de bœuf pour contracter mes chairs.» Les tortures durent depuis dix-neuf jours. Barbie quitte Lyon pour une opération meurtrière dans le Jura et y apprend que Lise Lesèvre s'occupe aussi des maquis. Il revient à son bureau, fou de rage. « Il était ivre. Avec lui, il y avait des Français, comme "Gueule tordue", des pauvres imbéciles qui suivaient. Barbie m'a attachée nue sur une chaise et m'a montré un manche de fouet sur lequel était attachée une boule hérissée de pointes. Ensuite, avec ça, ils m'ont frappée, jusqu'à me massacrer le dos. Ils étaient tous très saouls. Barbie buvait un mélange de bière et de rhum. Il semblait ne plus savoir ce qu'il faisait, comme s'il était devenu fou.» La femme perd connaissance et se réveille dans un fauteuil. Un vrai. « C'était un salon élégant, avec une rose dans un vase. J'ai cru que j'avais perdu la raison. » Barbie est agenouillé auprès d'elle. « Je vous admire beaucoup, m'a-t-il dit, car vous êtes très courageuse mais j'ai très bien connu ça. Tout le monde parle. Vous parlerez. Pourquoi pas maintenant?» Lise Lesèvre refuse et Barbie explose une nouvelle fois. « Liquidez-moi ça ! », ordonne-t-il à ses policiers, je ne veux plus la voir. » Avec les dix-sept dernières femmes à avoir été interrogées à Lyon, Lise Lesèvre est parquée dans un convoi d'hommes déportés. Son dossier est resté à la Gestapo, personne ne parle plus de la peine de mort à laquelle un simulacre de tribunal l'a condamnée quelques jours auparavant. Dans le train, son fils. « On s'est embrassés. » Sa voix se brise. « Plus tard, lorsqu'il a été exécuté, ses amis m'ont dit qu'il avait eu une tenue héroïque. Que son courage avait été admirable.» «Mon petit Jean-Pierre», dit-elle. Puis elle parle de son mari, mort à Dachau du typhus, qu'elle a croisé pour la dernière fois dans les couloirs de Lyon lorsqu'il lui a demandé d'être brave. Lise Lesèvre est déportée à Ravensbrück puis affectée à une usine d'armement. Et là, la petite femme tondue, la captive en galoche qui, chaque jour, note l'histoire de sa vie sur des papiers épars, recommence à se battre. Avec ses camarades, elle sabote les culots d'obus anti-aériens de 90 qu'elle doit sertir, elle ralentit la production, inverse les montages. « Monsieur le président, nos obus n'ont pas du tuer grand monde », dit-elle aujourd'hui avec un petit sourire. Des années plus tard, alors qu'elle est une femme libre, Lise Lesèvre se penche sur le miroir de sa salle de bain. Derrière elle, son coupé, la télévision retransmet une émission sur Klaus Altmann. Alors, dans la glace, elle voit le reflet du visage de l'homme. « Lorsque Me Klarsfeld se lève, le silence est total. D'une voix forte, il lit un passage d'une réaction prêtée à Klaus Barbie et, selon l'hebdomadaire qui l'a publié, VSD, rapportée par Me Vergés. « Quand Barbie a vu cette vieille décatie, aurait affirmé l'avocat au journal, il m'a dit : à 80 ans, elle n'a pas autre chose à faire qu 'à se traîner devant les caméras avec ses béquilles. Quand on a souffert, on reste chez soi et on se tait.» L'avocat de la partie civile demande que cette pièce soit versée au dossier. Me Vergés, calme, indique qu'il vient d'écrire au journaliste auteur de cet article et souhaite que cette lettre soit, dès lundi, également versée au dossier. Dans les premières minutes de l'audience, un moineau entré par effraction voletait sous la coupole. Maintenant, il est terré dans un relief de colonne. Comme s'il percevait les signes de détresse. Sorj
CHALANDON
Libération, 23-24 mai 1987 |
![]() Titre
du journal Libération
du 25 mai 1987
Madame Lagrange est tendue par un immense effort de lucidité que l'on croyait acquise mais qui se brise dans des larmes aussitôt ravalées. La famille Kadosché est conduite à Montluc: «J'étais avec ma mère dans la cave. C'est idiot, ce que je vais dire, j'avais 13 ans et j'étais effrayée à l'idée qu'il puisse y avoir des rats. Je n 'ai pas dormi. Toute la nuit, par le soupirail, j'ai vu descendre des familles juives. « Barbie voulait l'adresse des enfants. A 9 heures, il m'a emmenée dans sa voiture à la Gestapo. J'y suis restée toute la journée, il arrivait avec son sourire mince comme une lame de couteau. Cela a duré sept jours, coups de pied, coups de poing sur les plaies mal refermées de la veille. Le premier soir. il m'a ramenée lui-même à Montluc, j'étais comme .un pansement sanguinolent. Il m'a jetée dans les bras de ma mère en lui disant : "Voilà ce que tu as fait de ta fille." Après une semaine, il m'a mise dans une autre cellule, pendant quinze jours. Ma mère a cru que j'avais été tuée. » Le 23 juin 1944. Simone retrouve sa mère dans un convoi pour Drancy puis c'est le vovage vers Auschwitz. cinq jours et quatre nuits dans un wagon à bestiaux: «J'étais avantagée, j'étais prés de la porte. Il y avait une tinette au milieu, des hommes tenaient des vêtements tendus pour cacher ceux qui faisaient leurs besoins. Nous étions tous là à vomir. Le premier matin, on a trouvé un mort. C'est à partir de là qu'on est devenu des gens différents. On était soulagé d'avoir un peu plus d'air et de place lorsqu'on entassait les morts. » Auschwitz : « Mon premier drame, c'est quand on m'a enlevé mes cheveux ; voir toutes ces femmes nues. sans cheveux. sans poils, je ne me rendais pas compte que j'étais pareille. J'étais humiliée d'être immatriculée. A 86.24. Je me suis pincée jusqu'au sang, le quatre s'est à moitié effacé, ce furent mes premiers dix coups de schlague. On nous a dit : "Ici, on entre par la porte, on sort par la cheminée ", odeur douce, acre, amére. Je crains toujours de faire brûler un rôti, j'ai des souvenirs comme cela. « Je suis restée avec maman jusqu'au 23 août 1944. C'était la libération de Paris, c'est le jour où ma mère a été gazée. Les femmes faisaient la queue pendant trois heures: leurs enfants à la main, pour être gazées. Les chambres à gaz existent, elles sont griffées jusqu'au plafond. » Le 11 août 1944. le père de Simone Kadosché et ses deux neveux embarquent dans le dernier convoi. Le 18 janvier 1945, 25 000 déportés d'Auschwitz évacuent le camp à pied pour Ravensbrück. Le 11 février, à l'arrivée, ils ne sont plus que 2 000. « Mon père était très grand. Le lendemain de notre départ, j'ai vu une tête qui dépassait dans une colonne d'hommes, je lui ai fait signe, c'était mon père. Les Allemands n'avaient plus rien, ils étaient en civil, en bottes et en capote. Un Allemand m'a dit : "C'est ton père ?" Tu vas l'embrasser. Il a fait venir mon père. » Silence. Mme Lagrange se tait pour dénouer des larmes, en boule, au fond de sa gorge. « II a fait venir mon père, il l'a fait mettre à genoux. Il lui a tiré une balle dans la tête. Ce n'est pas Barbie qui lui a tiré une balle dans la tête mais c'est Barbie qui nous a envoyés là-bas. Mon malheur a été de n'avoir que 13 ans quand j'ai été déportée. Mais aujourd'hui, je n'ai que 57 ans et je peux témoigner longtemps, pour tous ceux qui ne sont pas revenus. » En 1972. Mme Lagrange a reconnu Klaus Barbie à la télévision. Elle n'a pas voulu le croire. « Et puis, en 1983, j'ai été confrontée à Barbie. J'ai dit que s'il y avait le moindre doute, que si Barbie avait un remords, je retirerais ma plainte. Pas une seule fois, nos yeux se sont baissés. Il m'a dit : «Si je vous regarde, c'est parce qu'après sept mois de prison, c'est toujours agréable de voir une femme appétissante.» J'ai fait consigner cette phrase et il m'a dit : «C'est dommage que vous ne compreniez pas la plaisanterie.» Jean-Baptiste
HARANG
Libération, 25 mai 1987 |
Le Matin, 1er juillet 1987 |
![]() La défense de Maître Vergés et de Maître Bouaïta repose sur l'idée que tous les crimes contre l'humanité n'ont pas été punis de façon égale, et en particulier les crimes du colonialisme. |
Klaus Barbie et son avocat, Maître Vergès Photo
parue dans
L'Evénement du Jeudi, semaine du 2 au 8 juillet 1987
|
![]() |
![]() Le
Monde du 5-6 juillet 1987
annonce le
verdict.
|
Klaus Barbie est mort en prison le 25 septembre 1991. |
Voir aussi,
Paul
Touvier et la
Milice à Lyon
et
Quatre criminels
contre l'humanité jugés en France
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